Au Moyen Âge, le suicide était considéré comme « un meurtre en soi même ». Aussi les juges confisquaient-ils les biens d’un suicidé, faisaient pendre son cadavre par les pieds, après l’avoir fait traîner par un cheval. L’Église lui refusait une sépulture parce que son offense à Dieu, inspirée par le diable, le condamnait à l’enfer. Aux Temps Modernes, il fallait lui faire quitter au plus vite sa maison maudite, en jetant son corps par la fenêtre ou en le glissant par le soupirail de la cave, face contre terre.
Mort subite, mort infamante
La mort subite, même par noyade, était considérée comme infamante. Le défunt n’avait alors pas le droit d’être inhumé chrétiennement, mais seulement d’être enseveli. Mais Guillaume Durand, évêque de Mende au XIIIe siècle, réclamait un peu d’indulgence :
« Si quelqu’un meurt subitement en se livrant aux jeux en usage comme à celui de la balle ou de la boule, il peut être enterré au cimetière, parce qu’il ne pensait pas à faire de mal à personne. »
Cette tolérance était assortie de restrictions chez certains canonistes : ceux qui étaient morts pendant qu’ils se consacraient aux divertissements de ce bas monde avaient droit à un ensevelissement, mais sans le chant des psaumes et sans les autres cérémonies funéraires. L’évêque de Mende était toutefois impitoyable pour les gens tués par un maléfice, souillés de vilenie. Leur mort devait être assimilée à celle qui frappe pendant l’acte d’adultère, un vol ou des jeux païens, c’est-à-dire tous (en particulier les jeux de hasard), sauf les tournois, que dénoncent pourtant quelques théologiens. La réprobation populaire n’interdisait plus une sépulture chrétienne aux personnes assassinées, mais leurs familles étaient pénalisées d’une amende.
L’enterrement avait presque toujours lieu le lendemain du décès. Des messes basses étaient parfois célébrées dès l’agonie et jusqu’à pendant un an après l’inhumation. Mais l’usage d’un service à l’église, avant l’absoute au cimetière, ne s’imposa pas avant le XIIIe siècle. Quant à l’habitude de la présence du corps à l’église, elle ne se répandit pas avant le XVIIe siècle, suite à la volonté manifestée par des testateurs dès le siècle précédent. La croix sur les tombes apparut au XVe siècle, mais ne se généralisa totalement qu’au XIXe.
Cercueil réutilisable
Les pauvres qui ne pouvaient s’offrir le luxe d’un cercueil, même grossier, étaient roulés dans un linceul et portés jusqu’au cimetière dans un cercueil récupéré par les fossoyeurs après l’enfouissement du corps. Par crainte de l’indifférence de leurs héritiers, des testateurs avaient soin de préciser parfois qu’ils exigeaient d’être enterrés dans un cercueil individuel.