Désiré Bianco (13 ans) : le plus jeune poilu mort pour la France durant la Grande Guerre

Si l’on fait bien attention, on peut trouver, à côté de l’hôpital militaire de Toulon, un buste de pierre représentant un gamin en uniforme.

Ce gamin s’appelait Désiré Bianco. Il a été tué le 8 mai 1915 en Turquie. Il avait treize ans. Son histoire est quasiment tombée dans l’oubli. Pourtant il a été le plus jeune poilu et, surtout, le plus jeune « mort pour la France » de la Grande Guerre.

Scan documentaire d’un article sur Désiré Bianco

Désiré Bianco est né à Caraglio, dans le Piémont (Italie) le 4 avril 1902. Comme beaucoup d’autres familles pauvres, les Bianco partent pour la France, espérant trouver une vie meilleure. Ils s’installent à Marseille, dans le quartier populaire de Menpenti.

En 1914, Désiré a donc douze ans et, comme de nombreux gamins de son âge, il veut voir ce que c’est la guerre. Par deux fois, il se cache dans un train militaire qui doit rejoindre la Meuse. On le découvre et il est renvoyé dans ses foyers.

Mais Désiré est un têtu. Le 2 mai 1915, il réussit à embarquer en cachette sur le France, paquebot transformé en transport de troupes qui convoie le 58e régiment d’infanterie coloniale. Sa destination est le détroit des Dardanelles en Turquie. Depuis février de la même année, un corps expéditionnaire franco-anglais tente une percée sur le front d’Orient.

Le France est déjà très loin quand le soldat Louis Nicolas découvre Désiré. Trop tard pour faire demi-tour. Le gamin, qui est bien trop jeune pour être enrôlé, devient pupille du régiment, une sorte de mascotte si l’on veut. On lui trouve quand même un fusil et un équipement de marsouin.

Le 6 mai, le 58e débarque sur une plage de la péninsule de Gallipoli sous un terrible tir de barrage des mitrailleuses turques. Le 7 mai, les Français se lancent à l’assaut d’un emplacement fortifié perché sur une crête, mais les pertes sont sévères et ils sont bloqués à 100 mètres du but. Le 8 mai, au matin, un ordre tombe : il faut prendre cette position coûte que coûte. Avant de partir à l’assaut, le soldat Louis Nicolas donne l’ordre à Désiré de rester à l’abri dans une tranchée. Le lieutenant Asquier lui retire même son fusil et lui donne son sabre à garder.

La suite, on la doit à Louis Nicolas. « Quel ne fut pas mon étonnement lorsque j’aperçus Désiré Bianco qui tenait de la main droite le sabre du lieutenant et se lançait devant la compagnie en criant : « En avant, à la baïonnette ! » (…) Soudain, je vis le petit Désiré chanceler et tomber. »

On n’a jamais retrouvé son corps. Pour cet enfant-soldat, la guerre n’avait duré que deux jours.

De retour en France, ses compagnons du 58e réclament qu’on rende hommage à Désiré. Mais son cas sort de l’ordinaire. Le 30 août 1916, il est quand même cité à l’ordre de l’Armée, avec l’accord du général Joffre, commandant en chef des forces françaises.

Premier de la Légion des Mille

Le souvenir de l’enfant-héros ne refait surface qu’une vingtaine d’années plus tard. En 1935, d’anciens poilus fondent la Légion des Mille, une institution honorifique qui regroupe les mille plus jeunes combattants volontaires de 1914-1918. Désiré Bianco est le premier d’entre eux. Bouleversé par cette histoire, l’ex-président de la République Gaston Doumergue écrit : « Le nom de cet enfant pourrait être inscrit au Panthéon des grands Français. »

Le 17 mai 1936, à Toulon, lors d’une cérémonie militaire, le buste de Désiré Bianco est dévoilé, en présence de ses parents. « Son histoire, faite de courage et de dévouement, mériterait au moins d’être racontée dans les écoles » juge le lieutenant-colonel Champeaux, conservateur du musée des Troupes de marine de Fréjus. Une rue de Marseille porte encore de nos jours le nom de Désiré. Mais qui se souvient de son histoire, de sa courte existence, brisée à deux mille kilomètres de là, aux Dardanelles ?

A Toulon : Le monument à la mémoire de Désiré Bianco

Retour en haut