Frisbee : du moule à tarte volant à la soucoupe volante

C’est le jeu de plage par excellence : le frisbee, cette rondelle de plastique coloré que l’on lance dans le ciel d’été. Mais qui donc a lancé le frisbee en premier ? Un pâtissier, un menuisier et les étudiants d’une très prestigieuse université.

Commençons par le pâtissier. Il s’appelle William Russell Frisbie. Dans les années 1870, il s’installe à Bridgeport, une petite ville du Connecticut. Sa spécialité, c’est la tarte. Il la vend dans son moule métallique embouti au nom de la Frisbie Pie Compagny.

Chaque matin, William Frisbie charge son camion à cheval et part vendre ses tartes dans toute la région. Notamment, une vingtaine de miles plus au sud, à New Haven, la ville où est installée l’université de Yale.

Les tartes de William Frisbie font un malheur auprès des étudiants. Un jour, à peine la dernière bouchée avalée, ils ont l’idée de lancer le moule. Attention, les têtes ! C’est un jeu dangereux ! Alors, pour prévenir ceux qui passent par là, à chaque lancer, on crie « frisbie ».

À vrai dire, les étudiants de Yale n’ont rien inventé puisque le lancer du disque existe depuis l’Antiquité. On le pratique déjà lors des tout premiers Jeux olympiques et Homère, dans L’Iliade, décrit diverses techniques de lancer.


Mais on n’en finit pas de réinventer la roue – le disque, en l’occurrence. Et les suivants sont deux amoureux : Fred et Lu.

En 1937, le jour de Thanksgiving, alors que la fête n’en finit pas, Fred et Lu passent le temps en se lançant le couvercle d’une boîte de pop-corn. Quelques jours plus tard, un peu par hasard, ils reprennent leur petit jeu sur une plage de Santa Monica. Avec un moule à cake, cette fois. Un passant leur fait alors une proposition saugrenue : il offre 25 cents pour leur racheter le jeu. Fred Morrison n’en revient pas ! Mais pourquoi pas ? Il est tout jeune (il n’a pas 20 ans), il travaille dans le bâtiment (il est menuisier) et il se dit qu’il pourrait monter un petit business, le week-end, sur la plage, en vendant des « flying cake pans » – des moules à cake volants.

Le petit frère du hula-hoop

L’initiative est rapidement interrompue par la guerre. Morrison fait partie des troupes américaines qui débarquent en Europe et il se lie d’amitié avec un autre G.I., Warren Franscioni, à qui il raconte un peu sa vie. Franscioni est amusé par l’histoire des moules à cake, mais il trouve qu’il faudrait les fabriquer en plastique. Ça volerait beaucoup mieux.

Une fois la guerre terminée, les deux amis concrétisent le projet. Ils le baptisent « flying saucer » (soucoupe volante), espérant ainsi profiter de l’engouement des Américains pour les OVNI. À ce moment-là, en 1947, tout le monde parle en effet de l’affaire Roswell, cet objet volant non identifié qui se serait écrasé près d’un ranch, à Roswell, au Nouveau-Mexique.

Fred Morrison vend ses soucoupes en plastique sur les foires, sur les marchés… Un soir, alors qu’il fait son baratin sur un parking, il est remarqué par les dirigeants d’une petite entreprise : Wham-O. Cette entreprise, qui jusque-là fabriquait des lance-pierres, s’apprête à commercialiser un cerceau baptisé « hula-hoop ».

On est en 1958 et Wham-O rachète à Fred Morrison son disque de plastique. Les patrons de l’entreprise sont tous deux universitaires. Ils ont entendu parler du « frisbie » qui faisait jadis fureur à Yale… Et ils décident donc de lancer le produit sous le nom de « frisbee ».

Fred Morrison ayant vendu son invention, il n’a plus rien à dire… Mais il est furax lorsqu’il prend connaissance de cette décision. « Avec un nom pareil, pense-t-il, ça ne marchera jamais ! »

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