Comment McDonald’s a frôlé la banqueroute aux JO de 1984

Les Jeux olympiques de 1984 ont eu lieu à Los Angeles. Comme à chaque édition ou presque au XXe siècle, le monde entier s’attend à une compétition acharnée entre les deux pays les plus puissants : les États-Unis et l’URSS. Mais cette année-là, le bras de fer n’aura pas lieu. En effet, les communistes décident de boycotter la quinzaine sportive sur fond de Guerre froide. Cette décision a privé des centaines d’athlètes de la compétition qu’ils attendaient depuis quatre ans. Pourtant, c’est bien le patron de McDonald’s qui était le plus malheureux de tous.

Les Jeux olympiques constituent toujours une grande fête et une formidable vitrine pour la ville hôte. En 1984, c’est Los Angeles qui est choisie pour accueillir la compétition sportive la plus regardée au monde. Partout en Californie et aux États-Unis, les mois qui précèdent l’évènement voient une excitation toute particulière gagner les habitants. Les différents édifices où auront lieu les épreuves sortent de terre et se mettent aux couleurs des cinq anneaux olympiques. Cette agitation particulière ne doit cependant pas faire oublier un « détail » : nous sommes toujours en pleine Guerre froide.

Dans ce contexte, le président américain Carter avait décidé que son pays boycotterait les JO de 1980, organisés à Moscou. Plus de soixante pays avaient suivi le mouvement lancé par les États-Unis, ce qui constitue aujourd’hui encore un record. Quatre ans plus tard, les rôles sont inversés. Pourtant, les autorités soviétiques affirmaient encore en décembre 1982 que leur pays allait participer aux Jeux et se moquaient des rumeurs annonçant un possible retrait des athlètes venus d’URSS. Dans un premier temps, leur volonté était effectivement de prendre part aux épreuves californiennes. Cette volonté a volé en éclats au cours de l’année 1983, où plusieurs évènements ont tendu les relations entre les deux pays.

Citons comme exemple l’envahissement par les troupes américaines de l’île communiste de Grenade, le déploiement de missiles de guerres en Europe par la même armée ou encore l’abattement d’un avion transportant des civils dans l’espace aérien soviétique. En mai 1984, les relations entre les deux superpuissances se sont totalement dégradées. Le 8 de ce même mois, l’URSS annonce que ses athlètes ne se déplaceront pas aux États-Unis, et ce afin de protester contre la politique internationale américaine. Très vite, plusieurs pays annoncent tour à tour leur retrait en soutien à l’Union soviétique. À la fin du mois, quinze nations ont renoncé à participer, parmi lesquelles l’Allemagne de l’Est, la Hongrie, la Pologne et la Corée du Nord. L’Albanie, l’Afghanistan et la Libye refusent également d’envoyer des sportifs, mais pour des motifs autres qu’un soutien politique.

Loin de ces agitations politiques, les responsables marketing du célèbre fast-food McDonald’s comptent bien profiter de l’évènement pour se faire de la pub et mettent sur pied un plan qui semble parfait : on décide de distribuer des cartes partout aux États-Unis et les performances des sportifs américains offrent des récompenses à tous leurs possesseurs. Une médaille d’or glanée par un Américain : un Big Mac offert sur simple présentation du sésame. Un paquet de frites pour une breloque d’argent et un soda pour le bronze. Les commerciaux de la chaîne se sont basés sur les résultats des Jeux olympiques de 1976, dernière édition qui a vu s’affronter et les USA et l’URSS. Ils tablent sur environ quatre-vingts médailles au total pour le pays de l’Oncle Sam, ce qui engendrerait des coûts tout à fait acceptables pour la publicité que cela lui rapporterait.

Oui, mais voilà, en 1984, l’URSS décide donc de n’envoyer aucun athlète. Comme elle était ultra-favorite dans la majorité des épreuves, leurs classements attendus sont à refaire. Sans cette coriace concurrence, les États-Unis écrasent les compétitions et remportent un total de 174 médailles sur 221 possibles ! Avec pas moins de 83 médailles d’or, le coût financier est immense pour McDonald’s. Au lieu d’une campagne de com’ à « moindres frais » pour se démarquer de leurs nombreux concurrents, la société se retrouve au bord de la faillite.

Tous les Américains s’en frottent les mains et les restaurants ne désemplissent pas, mais sans rapporter un dollar. Évidemment, la situation amuse outre-Atlantique et partout dans le monde. Les journaux européens ne se privent pas de suivre le nombre de burgers donnés par la marque au fur et à mesure des exploits américains.

Enfin, lorsque la quinzaine se termine, les dirigeants de l’entreprise peuvent souffler. Il leur faudra plusieurs années pour s’en remettre et l’épisode tragi-comique rentrera dans la mémoire collective aux USA. La série Les Simpsons y fera par exemple directement allusion au cours de l’un de ses épisodes. Plusieurs films comme Texasville utilisent également cette anecdote pour encrer le récit dans notre univers.

À la vue du chiffre d’affaires annuel de la chaîne, McDonald’s s’en est finalement bien remis. Si l’entreprise prospère aujourd’hui aux quatre coins du globe, tout a bien failli s’arrêter à cause d’un coup de pub lancé au mauvais moment et d’une décision politique qu’ils ne pouvaient pas anticiper.

Auteur : Arnaud Pitout

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