Nous connaissons tous le récit de la mort de Molière, tel qu’il nous a été appris : alors qu’il donnait une représentation de sa dernière pièce, le Malade imaginaire, Molière fut soudain pris d’un malaise, et mourut sur scène en pleine représentation. Toutefois, il semblerait que le mythe ait pris le pas sur la véracité historique...
Molière, de son vrai nom Jean-Baptiste Poquelin[1], naquit en janvier 1622 au sein d’une famille bourgeoise. Le jeune homme, refusant de reprendre le commerce de son père, tapissier à la Cour, décida de se tourner très tôt vers le théâtre.
Après avoir passé plusieurs années en province aux côtés de sa troupe, Molière rentra à Paris en 1658, faisant son entrée à la Cour. Recevant la protection de Philippe d’Orléans, frère du roi, puis de Louis XIV en personne, Molière put se consacrer pleinement à son art. En l’espace d’une décennie, il donna naissance à ses pièces les plus célèbres, parmi lesquelles L’Ecole des femmes (1662), Tartuffe (1664), Dom Juan (1665), Le médecin malgré lui (1666), L’avare (1668), Le bourgeois gentilhomme (1670), et Le malade imaginaire (1673).
Contrairement à une autre idée reçue, Molière ne connut jamais véritablement de disgrâce, malgré les scandales et controverses ayant éclaté à cause de ses pièces[2]. En effet, ce dernier bénéficia d’un soutien indéfectible de Louis XIV. A l’orée de sa mort, Molière était un homme riche, preuve de son succès et de son influence à la Cour. Ainsi, l’on estime que son salaire annuel était l’équivalent de celui d’un gouverneur de province, ce qui est colossal pour un comédien.
Le 17 février 1673, à l’occasion de la quatrième représentation du Malade imaginaire, Molière se sentit plus fatigué qu’à l’habitude mais refusa d’annuler le spectacle. Rongé par la douleur, le comédien parvint tant bien que mal à terminer la pièce, puis fut transporté à son domicile.
Molière, qui souffrait vraisemblablement d’une maladie pulmonaire depuis 1666, fut pris d’une violente quinte de toux une fois arrivé chez lui, puis se mit à cracher du sang. Dans la soirée, il fut suffoqué par de l’abondance de sang qui remplissait ses poumons (sans doute causé par un anévrisme pulmonaire).
Comme nous pouvons le constater, Molière ne mourut donc pas sur scène, mais peu de temps après une représentation. Cependant, ce dernier étant comédien, il ne pouvait pas bénéficier d’une sépulture chrétienne (depuis le IVème siècle, les membres de cette profession étaient excommuniés de facto par l’Église). Par ailleurs, il n’avait pas eu le temps de signer une renonciation au métier de comédien, comme cela était la coutume.
Grâce à l’intervention de Louis XIV, Molière eut finalement droit à une sépulture au sein du cimetière Saint-Joseph, mais l’inhumation devait se faire sans faste et de nuit (l’enterrement se déroula donc dans la nuit du 21 février).
A noter que pendant la Révolution française, les restes de Molière furent inhumés et placés dans le couvent des Petits-Augustins, devenu Musée des monuments français en 1795. En 1816, cet établissement fut fermé, ses locaux affectés à l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts, et ses collections cédées au Louvre. Les restes de Molière furent alors inhumés au cimetière du Père-Lachaise.
[1] A noter qu’aujourd’hui nous ne connaissons pas la signification de ce pseudonyme. Au XIXème siècle, certains historiens ont tenté de faire un rapprochement avec des personnalités antérieures à Molière et portant le même nom ; aujourd’hui, l’on pense que ce pseudonyme ferait référence à un lieu.
[2] Comme par exemple la querelle de L’Ecole des femmes, pièce jugée indécente, ou la querelle de Tartuffe, pièce qui fut interdite et lourdement remaniée par Molière.