L’idée d’une machine à calculer est très ancienne. La première réalisation notable est celle de l’Allemand Wilhelm Schickard (1592-1635), en 1623, qui permettait de faire des additions et soustractions sans effort mental.
Puis il y aura la machine de Pascal, la « pascaline », en 1641. Puis, bien d’autres encore, et dès la fin du XIXe siècle des machines à calculer sont proposées par divers constructeurs. Elles sont de plus en plus perfectionnées, et les comptables, les astronomes, les ingénieurs les utilisent quotidiennement. Mais ce sont des machines qui ne peuvent faire qu’une opération à la fois. De grands esprits vont imaginer d’aller bien plus loin. Il y aura, tout au long de la première moitié du XXe siècle, toutes sortes de travaux théoriques et pratiques sur l’idée non plus du simple calcul « mécanique », mais du calcul « automatique ».
La différence, c’est d’arriver à doter une machine d’une certaine autonomie, lui permettant d’effectuer, sans intervention humaine, des séquences d’opérations en vue de résoudre, non une simple addition ou une seule multiplication, mais une équation, voire même un ensemble d’équations.
Toute cette histoire est extrêmement complexe. Il y a de nombreux intervenants, des publications innombrables, l’historien s’y perd. Car il y a encore les recherches militaires, souvent plus ou moins secrètes. Les artilleurs voudraient des machines pour calculer les trajectoires de leurs obus. Les spécialistes du « renseignement » voudraient des machines pour déchiffrer les messages codés de l’ennemi.
Robert Hawkins
Il y a d’importants travaux en France, des travaux considérables en Allemagne, des travaux essentiels en Angleterre. Mais c’est en Amérique que toutes ces recherches vont converger, et vont passer du stade expérimental à celui des réalisations commerciales. C’est, encore, une histoire compliquée, car les diverses forces militaires des États-Unis vont développer des projets parallèles, parfois concurrents. L’US Navy, l’US Air Force et l’US Army sont évidemment intéressées par la question. Les différentes universités et écoles d’ingénieurs vont intervenir, parfois de manière décisive, dans l’avancement de ces différents projets.
Enfin, il s’agit de construire des machines, donc de mobiliser des ressources financières, et plusieurs entreprises vont apporter leur contribution à l’invention qui, au fait, est tout de même une des plus extraordinaires de tous les temps.
En février 1944, c’est un assemblage de l'Automatic Sequence Controled Calculator, ASCC, par la société IBM, tout à fait impressionnant, par sa conception de 800 000 éléments électromécaniques. Le responsable du développement de cette machine est l’ingénieur Clair D. Lake (1888- 1958). Elle a été développée avec l’aide de l’Université de Harvard, et on l’appelle parfois la machine Harvard-IBM.
L’ensemble pèse près de 5 tonnes ! La machine ASCC est officiellement présentée à l’Université de Harvard le 7 août 1944. Elle est baptisée MARK I, ce qui est beaucoup plus sexy. La machine est cédée à l’US Navy, où elle accélérera considérablement les calculs de balistique. Aiken perfectionne la machine, et produira successivement (et avec succès) le calculateur MARK II et le calculateur MARK III. Celui-ci, lancé en 1949, est le fruit d’une décision décisive. Aiken abandonne les composants électromécaniques et utilise des tubes électroniques. À ce moment, d’autres machines électroniques sont déjà sur le marché. Leur développement sera fulgurant. Pendant quelques décennies, IBM sera le plus important, et de loin, fabricant d’electronic computers du monde.