Fantômes polymorphes

La liste des fantômes qui ont élu domicile de l’autre côté de la Manche est infiniment longue. Il n’est pas de personnages illustres, de demeures séculaires qui n’ait le sien. Londres possède d’ailleurs son « Club des fantômes », fondé en 1862. Ses membres font régulièrement le point sur les dernières apparitions de spectres les plus dignes d’intérêt. Selon les statistiques (qui se mêlent décidément de tout), un Anglais sur quatorze aurait aperçu un « esprit » au moins une fois dans sa vie.

 

Il est donc aisé de comprendre que les lieux historiques ne sont pas les seuls qu’affectionnent les revenants britanniques. Il y a quelques années, les femmes d’ouvrage de l’aéroport londonien de Heathrow refusèrent de s’approcher d’un certain quadrimoteur DC-10 qu’elles prétendaient hanté. Plus récemment, le personnel du Circus Hotel d’Edimbourg se mit en grève pour cause de fantômes. Le syndicat exigea l’intervention d’un parapsychologue avant la reprise du travail.

 

Mais il n’y a pas que des maisons ou des châteaux hantés. Des objets, même très usuels, peuvent l’être aussi. Une Anglaise a raconté son étrange aventure à un journal britannique : « Pendant des années, j’ai partagé ma machine à coudre avec un fantôme. Chaque fois que je terminais un ouvrage, les fils, les aiguilles et les bobines changeaient mystérieusement de place. Le phénomène s’est poursuivi jusqu’au jour où j’ai vendu cette machine hantée pour en racheter une qui ne l’était pas ».

 

Même si le Royaume-Uni semble être la terre par excellence des phénomènes de hantise, elle n'en a cependant pas le monopole. En effet, il y a quelques années, la presse relatait le cas, en Norvège, d’une voiture hantée. Celle-ci s’auréolait en pleine nuit d’une étrange lueur bleue et le klaxon se déclenchait de manière intempestive. Plus grave, le conducteur se sentait parfois pris à la gorge par des mains glacées et invisibles, tandis qu’une voix d’outre-tombe lui ordonnait de « prendre la direction de Goteborg ».
En 1954, au domicile d’un Américain d’Indianapolis, policiers, ingénieurs et experts en parapsychologie s’évertuèrent en vain à percer le mystère d’un poste de télévision hanté. Pendant un mois, chaque fois que M. Mackay allumait son téléviseur, sur n’importe quelle chaîne, invariablement apparaissait l’image fixe de son beau-père sur son lit d’agonie. Celui-ci était décédé plusieurs semaines auparavant. Au bout d’un mois, l’image s’effaça enfin, cédant la place aux émissions normales.

 

Mais faut-il y croire ?

Devant l’irrationnel, la raison reste confondue, perplexe. Beaucoup d'entre nous restent totalement hermétiques à tout cela. Pourtant, assez curieusement, les observations réalisées par les chasseurs de fantômes dans leur ensemble sont plutôt concordantes : à l’occasion de chaque apparition, les témoins ont signalé une sensation de malaise, une présence envahissante, une chute de la température, une modification de l’atmosphère ambiante, un peu comme si le fantôme puisait de l’énergie dans l’environnement matériel. Des lueurs étranges, des odeurs parfumées accompagnent souvent le phénomène. À certaines occasions, des photographies ont été prises mais ces documents, quoique parfois très déconcertants, n’ont jamais pu constituer une preuve irréfutable.

 

En attendant qu’un début d’explication vraiment satisfaisante soit apporté à cette inépuisable énigme, les planchers des vieilles demeures d’Angleterre (et d’ailleurs) continueront longtemps de grincer par les nuits sans lune et les portes de s’ouvrir mystérieusement sans l’aide d’aucune main humaine...

 

Retour en haut